Réforme de la formation : décryptage de 7 décrets (CPF et formation à distance)

La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel nécessite plusieurs dizaines de décrets afin d’être mise en application.

Ci-dessous, le décryptage de 7 décrets parus fin 2018 :

Nous reviendrons vers vous régulièrement pour vous présenter les nouveaux décrets.

 

I.    Alimentation du compte personnel de formation : un décret précise les nouvelles modalités d’alimentation du compte personnel de formation (CPF) applicables à compter du 1er janvier 2019.

Décret n°2018-1329 du 28 décembre 2018 relatif aux montants et aux modalités d’alimentation du compte personnel de formation.

Le compte personnel de formation du salarié ayant effectué sur l’année une durée de travail d’au moins un mi-temps est alimenté à hauteur de 500 euros au titre de cette année, dans la limite d’un plafond total de 5 000 euros.

Pour une durée de travail inférieure, le compte est alimenté proportionnellement au temps de travail effectué. Lorsque le calcul des droits aboutit à un montant en euros comportant des décimales, ce montant est arrondi à la deuxième décimale, au centime d’euro supérieur.

Pour les salariés soumis à une convention de forfait annuel en jours, le nombre de jours de travail de référence pour le calcul de l’alimentation du compte est égal au nombre de jours compris dans le forfait dans la limite de 218 jours. Art. R6323-1 du Code du travail

Le calcul des droits des salariés est effectué par la Caisse des dépôts et consignations au moyen des données issues de la déclaration sociale nominative des employeurs.

Un arrêté du ministre chargé de la Formation professionnelle fixera les modalités de ce calcul en cas d’absence de ces données et lorsque ces données sont incomplètes ou erronées. Art. R6323-1 du Code du travail

Le CPF du salarié dont le niveau de qualification est inférieur au niveau V qui a effectué une durée de travail supérieure ou égale à la moitié de la durée légale ou conventionnelle de travail sur l’ensemble de l’année est alimenté, au titre de cette année, à hauteur de 800 euros, dans la limite d’un plafond de 8 000 euros. Art. R6323-3-1 du Code du travail.

 

II.   Monétisation du compte personnel de formation : un décret publié au Journal officiel du 15 décembre 2018 détermine le montant horaire permettant la conversion en euros des heures acquises au titre du compte personnel de formation au 31 décembre 2018.

Décret n°2018-1153 du 14 décembre 2018 relatif aux modalités de conversion des heures acquises au titre du compte personnel de formation en euros (JO du 15.12.18)

Les heures inscrites sur le compte personnel de formation et les heures acquises au titre du droit individuel à la formation au 31 décembre 2018 sont converties en euros à raison de 15 euros par heure.

Ainsi, pour le titulaire du compte qui aurait déclaré 120 heures de DIF reportable et aurait acquis chaque année 24 heures de CPF et qui n’aurait pas mobilisé ses droits (soit 96 heures au 31 décembre 2018), les droits convertis s’élèveront à 3 240 euros.

Attention toutefois, les droits correspondant à l’année 2018 (24 heures pour un salarié à temps plein qualifié) ne devraient être visibles sur le compte du titulaire qu’au printemps 2019.

Par ailleurs, on rappellera que les dispositions de la loi du 5 mars 2014 prévoyant que les heures de DIF reportées sur le compte personnel de formation ne peuvent être mobilisées que jusqu’au 1er janvier 2021 (art. 1er, V) n’ont pas été abrogées par la loi Avenir professionnel. Il est cependant dans ce texte fait état des « heures » de DIF et non de droits en euros, ce qui laisse l’avenir de cette disposition incertain.

III.   Formations éligibles et conditions de mobilisation du CPF : deux décrets d’application de la loi Avenir professionnel précisent les modalités d’utilisation du compte personnel de formation (CPF)

Décret n°2018-1336 du 28 décembre 2018 relatif aux conditions de mobilisation du compte personnel de formation par le salarié

Décret n°2018-1338 du 28 décembre 2018 relatif aux formations éligibles au titre du compte personnel de formation

Précisions sur les formations éligibles

Un des décrets aménage les dispositions du Code du travail relatives aux bilans de compétences, et aux préparations au permis de conduire qui peuvent être suivies dans le cadre du CPF. Ces nouvelles règles sont applicables depuis le 1er janvier 2019.

Le bilan de compétences peut notamment être effectué dans le cadre du conseil en évolution professionnelle. A cet effet, le titulaire du compte est informé de la possibilité de s’adresser à un organisme de conseil en évolution professionnelle pour être accompagné dans sa réflexion sur son évolution professionnelle, préalablement à la décision de mobiliser ses droits pour effectuer un bilan. Cette information est fournie par l’intermédiaire du site internet du CPF. Art. D6323-6 du Code du travail

La préparation à l’épreuve théorique du Code de la route et à l’épreuve pratique du permis de conduire autorisant la conduite des voitures et poids lourds est éligible au compte personnel de formation dans les conditions suivantes :

  • l’obtention du permis de conduire contribue à la réalisation d’un projet professionnel ou à favoriser la sécurisation du parcours professionnel du titulaire du compte ;
  • le titulaire du compte ne fait pas l’objet d’une suspension de son permis de conduire ou d’une interdiction de solliciter un permis de conduire.

Cette obligation est vérifiée par une attestation sur l’honneur de l’intéressé produite lors de la mobilisation de son compte.

  • La préparation est assurée par un établissement d’enseignement de la conduite et de la sécurité routière qui satisfait l’ensemble des obligations suivantes :
    • disposer d’un agrément préfectoral
    • avoir procédé à sa déclaration d’activité. Art. D6323-8 du Code du travail

Autorisation d’absence pour une formation suivie par un salarié sur le temps de travail

Le salarié qui souhaite mobiliser son CPF pour suivre une action de formation en tout ou partie pendant le temps de travail doit adresser une demande d’autorisation d’absence à son employeur avant le début de l’action dans un délai qui ne peut être inférieur à :

  • 60 jours calendaires si la durée de l’action de formation est inférieure à 6 mois ;
  • 120 jours calendaires si la durée de l’action de formation est égale ou supérieure à six mois.

A compter de la réception de la demande, l’employeur dispose d’un délai de 30 jours calendaires pour notifier sa réponse au salarié. L’absence de réponse de l’employeur dans ce délai vaut acceptation de la demande. Art. D6323-4 du Code du travail

Prise en charge des frais

Les frais pédagogiques et les frais liés à la validation des compétences et des connaissances afférents à une action suivie par un salarié, pendant son temps de travail ou hors temps de travail, sont pris en charge au titre de 2019 par les opérateurs de compétences.

A compter de 2020, ils seront pris en charge par la Caisse des dépôts et consignations. Cette Caisse devra effectuer un suivi de cette prise en charge et l’intégrer à son rapport annuel de gestion du CPF remis à France compétences. Art. D6323-5 du Code du travail

 

IV.   Modalités d’abondement du CPF : un décret publié au Journal Officiel du 20 décembre 2018 organise la monétisation des abondements supplémentaires.

Décret n°2018-1171 du 18 décembre 2018 relatif aux modalités d’abondement du compte personnel de formation (JO du 20.12.18)

Ce décret confirme le maintien de l’abondement supplémentaire « correctif » mis en place dans le cadre de l’entretien d’évolution professionnelle fixé à 3 000 €. Cette somme due par l’entreprise est versée par l’entreprise à l’OPCO.

 

V.   Contrats soumis à la contribution spécifique de 1 % dédiée au financement du CPF :

Un décret publié au JO du 26 décembre 2018 fixe la liste des types de contrats à durée déterminée ne donnant pas lieu au versement de la contribution spécifique dédiée au financement du compte personnel de formation égale à 1 % du revenu d’activité retenu pour le calcul des cotisations sociales des titulaires d’un contrat à durée déterminée.

Décret n°2018-1233 du 24 décembre 2018 relatif aux contrats à durée déterminée ne donnant pas lieu au versement de la contribution spécifique assise sur le revenu d’activité pour les cotisations sociales des titulaires d’un contrat à durée déterminée

Les contrats à durée déterminée ne donnant pas lieu au versement de la contribution spécifique sont :

  • les contrats d’accompagnement dans l’emploi ;
  • les contrats d’apprentissage ;
  • les contrats de professionnalisation ;
  • les contrats conclus avec des jeunes au cours de leur cursus scolaire ou universitaire ;
  • les contrats de travail à durée déterminée qui se poursuivent par des contrats à durée indéterminée ;
  • les contrats de travail à durée déterminée conclus pour permettre au salarié saisonnier de participer à une action de formation prévue au plan de développement des compétences de l’entreprise.

VI.   Formation à distance, formation en situation de travail et convention de formation :

Un décret précise les conditions d’organisation des actions de formation qui se déroulent, en tout ou partie, à distance ou en situation de travail. Il détermine par ailleurs les modalités d’acquisition des actions de développement des compétences auprès des organismes prestataires. Il définit les obligations du prestataire et du titulaire du compte personnel de formation lorsque l’action de développement des compétences est mise en œuvre dans le cadre du compte. Art. L6313-2, L6313-8 et L6353-1 du Code du travail, modifiés par la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018-art. 4 et 24

Décret n°2018-1341 du 28 décembre 2018 relatif aux actions de formation et aux modalités de conventionnement des actions de développement des compétences (JO du 30.12.18)

La mise en œuvre d’une action de formation, en tout ou partie, à distance comprend :

  • une assistance technique et pédagogique appropriée pour accompagner le bénéficiaire dans le déroulement de son parcours ;
  • une information du bénéficiaire sur les activités pédagogiques à effectuer à distance et leur durée moyenne ;
  • des évaluations qui jalonnent ou concluent l’action de formation.

La mise en œuvre d’une action de formation en situation de travail (Afest) comprend :

  • l’analyse de l’activité de travail pour, le cas échéant, l’adapter à des fins pédagogiques ;
  • la désignation préalable d’un formateur pouvant exercer une fonction tutorale ;
  • la mise en place de phases réflexives, distinctes des mises en situation de travail et destinées à utiliser à des fins pédagogiques les enseignements tirés de la situation de travail, qui permettent d’observer et d’analyser les écarts entre les attendus, les réalisations et les acquis de chaque mise en situation afin de consolider et d’expliciter les apprentissages ;
  • des évaluations spécifiques des acquis de la formation qui jalonnent ou concluent l’action.

Modalités de conventionnement des actions de développement des compétences :

Mentions obligatoires de la convention

Lorsque les actions concourant au développement des compétences sont financées par des fonds publics ou mutualisés, la convention conclue entre l’acheteur et l’organisme qui les dispense, comporte :

  • l’intitulé, l’objectif et le contenu de l’action, les moyens prévus, la durée et la période de réalisation, ainsi que les modalités de déroulement, de suivi et de sanction de l’action ;
  • le prix de l’action et les modalités de règlement.

Particularisme du CPF

Dans le cadre des actions concourant au développement des compétences financées par la Caisse des dépôts et consignations et mises en œuvre dans le cadre du compte personnel de formation, les conditions générales d’utilisation du service dématérialisé tiennent lieu de convention de formation.